Le principe d’égalité face à l’exercice du droit de vote est un principe général du droit électoral, a indiqué pour la première fois la chambre sociale dans un arrêt en date du 1er juin 2022. Par conséquent, il appartient à l’employeur et aux partenaires sociaux lorsqu’un accord collectif a été conclu, de s’assurer que tous les électeurs disposeront du matériel nécessaire pour prendre part au scrutin, en particulier lorsque ce dernier s’exerce exclusivement par voie électronique. Au besoin, un poste informatique dédié doit être mis en place pour les salariés non pourvus d’un ordinateur professionnel. Certes, le recours au vote électronique doit être entouré de nombreuses garanties destinées à assurer la sincérité du scrutin. Mais celles-ci ne doivent pas conduire à faire obstacle au vote des électeurs. À l’employeur de trouver le procédé adéquat, s’il ne veut pas prendre le risque de voir le scrutin ultérieurement annulé, et ce quelle que soit son incidence sur le résultat (Cass. soc., 1er juin 2022, nº 20-22.860).
Mise en place du vote électronique par accord d’entreprise ou de groupe ou à défaut par décision unilatérale (article L. 2314-26 du Code du travail)
Le recours au vote électronique peut être prévu par accord d’entreprise ou par accord de groupe (article R. 2314-5 du code du travail). Il s’agit d’un accord collectif de droit commun, soumis en tant que tel aux règles de validité issues du droit de la négociation collective : signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au CSE, ou validation par référendum si cette condition n’est pas remplie à condition que l’accord ait été signé par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés au premier tour des élections (article L. 2232-12 du code du travail).
Afin de permettre le recours au vote électronique, l’accord d’entreprise ou de groupe doit être déposé auprès de l’administration (la Direccte) avant la signature du protocole préélectoral, c’est-à-dire au plus tard la veille, de façon à être pleinement applicable au moment de celle-ci (Cass. soc., 28 sept. 2011, nº 11-60.028 PB). La pratique consistant à conclure le même jour l’accord d’entreprise sur le vote électronique et le protocole préélectoral est donc exclu.
En cas d’établissements multiples, même si les élections ont lieu dans le cadre d’un seul établissement, la possibilité de recourir au vote électronique ne peut être « ouverte » que par un accord d’entreprise ou par un accord de groupe, le recours à cette modalité de vote ne pouvant être décidé dans le seul cadre d’un accord d’établissement (Cass. soc., 10 mars 2010, nº 09-60.096). En revanche, la Cour de cassation admet la pratique qui consiste, dans les entreprises à établissements multiples, à fixer le cadre général du recours au vote électronique par un accord conclu au niveau de l’entreprise et à renvoyer les modalités de sa mise en œuvre à un accord d’établissement (Cass. soc., 3 nov. 2016, nº 15-21.574).
Ce n’est que lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation, un accord collectif n’a pas pu être conclu que l’employeur peut prévoir par décision unilatérale la possibilité et les modalités d’un vote électronique. En l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise, l’employeur n’est toutefois pas tenu de tenter préalablement une négociation dérogatoire (Cass. soc., 13 janv. 2021, nº 19-23.533). Un engagement sérieux et loyal des négociations implique que, dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives, l’employeur ait convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions. L’employeur doit également leur avoir communiqué les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et avoir répondu de manière motivée aux éventuelles propositions des organisations syndicales (article L.2242-5 du Code du travail). Ce recours à la décision unilatérale vaut aussi pour les élections partielles se déroulant, le cas échéant, au cours du mandat (C. trav., art. R. 2314-5).